Cancer localisé de la prostate : quels facteurs influencent le succès du traitement par HIFU ?
Les ultrasons focalisés de haute intensité (HIFU) occupent désormais une place reconnue dans l’arsenal thérapeutique du cancer localisé de la prostate. Alternative conservatrice à la prostatectomie totale, cette technique attire particulièrement les patients soucieux de préserver leur qualité de vie. Une nouvelle analyse issue de la cohorte française HIFI apporte aujourd’hui un éclairage précieux : tous les patients ne tirent pas le même bénéfice du HIFU, et certains paramètres biologiques permettent d’anticiper le risque d’échec.
Le HIFU, une option validée et désormais remboursée
Depuis la publication de l’étude HIFI‑01 dans European Urology fin 2024, le HIFU s’est imposé comme une option thérapeutique crédible pour les adénocarcinomes prostatiques localisés (stades T1‑T2) à risque faible ou intermédiaire, ainsi que dans certaines récidives locales après radiothérapie. Les résultats ont montré une efficacité oncologique comparable à la chirurgie, avec un avantage net sur le plan fonctionnel, notamment pour la continence urinaire et la fonction érectile.
En France, cette reconnaissance s’est traduite par une étape majeure : depuis le 1er septembre 2025, la procédure de HIFU robotisé Focal One® est définitivement prise en charge par l’Assurance maladie, en traitement initial comme en situation de rattrapage post‑radiothérapie.
Principe et intérêt de la technique
Le HIFU repose sur l’émission d’ultrasons focalisés par voie transrectale, permettant une destruction ciblée du tissu tumoral par effet thermique. Cette approche peut concerner toute la glande ou seulement la zone tumorale, grâce à une navigation robotisée de haute précision. L’objectif est clair : traiter efficacement le cancer tout en limitant les séquelles liées aux traitements radicaux.
Plusieurs études observationnelles, avec plus de dix ans de recul, avaient déjà suggéré une survie spécifique comparable entre HIFU, prostatectomie, radiothérapie et curiethérapie, tout en mettant en évidence une moindre morbidité fonctionnelle avec les traitements focaux.
Pourquoi rechercher des facteurs pronostiques ?
Si l’efficacité globale du HIFU est désormais bien établie, une question restait ouverte : peut‑on identifier, avant le traitement, des profils de patients plus à risque d’échec nécessitant un traitement de rattrapage ? C’est précisément l’objectif de l’analyse post hoc menée par le groupe français HIFI, présentée au Congrès français d’urologie 2025 par le Pr Pascal Rischmann (Toulouse).
Une analyse post hoc à grande échelle
Les investigateurs ont exploité la base de données HIFI, incluant 1 967 procédures HIFU réalisées de façon prospective dans 46 centres français. Les patients présentaient un cancer localisé ISUP 1 ou 2 (cT1‑T2, PSA < 15 ng/mL), avec au maximum quatre sextants atteints sur six.
L’analyse a évalué l’impact de plusieurs paramètres pré‑thérapeutiques :
- le taux de PSA avant traitement,
- la densité de PSA (PSA/volume prostatique),
- le nombre et la localisation des sextants atteints,
- le caractère unilatéral ou bilatéral des lésions,
- le volume prostatique traité.
Le critère principal était la survie sans recours à un traitement de rattrapage (chirurgie, radiothérapie ou autre).
PSA et densité de PSA : des marqueurs clés
Avec un PSA médian initial de 7,1 ng/mL et une majorité de tumeurs ISUP 2, le taux de survie sans traitement de rattrapage atteignait près de 90 % à 30 mois. Toutefois, le risque d’échec augmentait nettement avec le PSA pré‑thérapeutique.
Comparativement aux patients ayant un PSA < 5 ng/mL, le risque de traitement de rattrapage était multiplié par plus de deux lorsque le PSA se situait entre 5 et 9 ng/mL, et par plus de trois au‑delà de 9 ng/mL. Cette tendance était retrouvée aussi bien chez les patients ISUP 1 que ISUP 2.
La densité de PSA s’est également révélée discriminante. Une PSAd supérieure à 0,20 était associée à une augmentation significative du risque d’échec, contrairement aux valeurs intermédiaires (0,15‑0,20), qui ne semblaient pas péjoratives.
Des critères anatomiques finalement peu prédictifs
À l’inverse, certains paramètres souvent redoutés se sont montrés peu influents. Ni le nombre de sextants envahis, ni le volume traité, ni le caractère unilatéral ou bilatéral de la maladie n’augmentaient significativement le risque de rattrapage.
Une exception mérite toutefois d’être soulignée : l’atteinte bilatérale de l’apex prostatique, associée à une baisse de la survie sans traitement de rattrapage, autour de 84 %, contre près de 90 % pour l’ensemble de la cohorte.
