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Introduction
La cicatrisation est un processus normal qui se manifeste quand la peau est lésée, elle s’amorce donc au moment de la lésion du derme et se divise en trois phases qui se chevauchent:

La phase infammatoire : commence par l’activation de la cascade de coagulation, les plaquettes y exercent un rôle en libérant les cytokines responsables de la migration et de l’activation des macrophages et des neutrophiles nécessaires à l’élimination des débris et des bactéries.

La phase proliférative : elle survient après 48 heures et elle dure 10 à 15 jours, les fbroblastes synthétisent alors une nouvelle matrice extracellulaire (élastine, collagène, protéoglycane, fbronectine) permettant la prolifération vasculaire et la réépithélisation .

La phase de remodelage est une phase de maturation, elle se prolonge jusqu’à deux ans. Ce phénomène complexe est régi par une multitude de cytokines dont les facteurs de croissances, les protéines kinases ainsi que les métalloproteinases et leurs inhibiteurs. Quand tout ce processus évolue normalement, il y a la formation de cicatrices permanentes se confondant plutôt avec la peau péricicatricielle mais visiblement diférente du fait qu’elle n’est pas striée et qu’elle est dépourvue d’annexes (poils, glandes sébacées et sudoripares), de plus , les cicatrices sont souvent hypo ou hyperpigmentées .

Les cicatrices hypertrophiques et chéloïdes apparaissent chez les personnes ayant une prédisposition génétique. Elles sont dues à un processus de cicatrisation pathologique lié à la production excessive de collagène, une augmentation du nombre des fbroblastes, une hypervascularisation et une infammation prolongée. Elles sont responsables de problèmes esthétiques et fonctionnels et afectent la qualité de vie des patients. Il est important de diférencier les deux types de cicatrices :

1- La cicatrice hypertrophique
Les cicatrices hypertrophiques sont épaisses, dures, érythémateuses, limitées à la zone traumatisée, et ne présentent pas d’extension. Elles apparaissent généralement rapidement dans les semaines qui suivent la plaie, connaissent une phase de croissance rapide sur quelques semaines, une stabilisation sur quelques mois, puis une régression spontanée laissant parfois pour séquelle une trace élargie mais plane et asymptomatique.

2- La cicatrice chéloïde est une véritable « tumeur » fbreuse cicatricielle ayant tendance à récidiver qui peut être initiée par n’importe quelle petite altération de la peau : une blessure, coupure ou même une brûlure. Pour des raisons encore mal comprises, les chéloïdes semblent se développer préférentiellement sur certaines parties du corps plutôt que sur d’autres, dont le cou, les épaules, le thorax ou encore les oreilles. Ces cicatrices résultent de l’accumulation anormale de tissus fbreux cicatriciels. A l’image d’un cancer bénin, leur croissance verticale et horizontale est continue et tend à perdurer après traitement. Chez les personnes les plus prédisposées, elles peuvent se développer sur tout le corps entraînant ainsi des problèmes esthétiques. Les cicatrices chéloïdes sont généralement actives et peuvent causer des démangeaisons (prurit) et douleurs qui peuvent être extrêmement ennuyeuses et affecter la qualité de vie du patient.

Généralités et cliniques
Cliniquement, les cicatrices chéloïdes débutent par des plaques roses ou rouges, fermes, bien définies, télangiectasiques, caoutchouteuses, qui, durant plusieurs mois, peuvent être difficiles à distinguer des cicatrices hypertrophiques. Plus tard, la croissance incontrôlée s’étendra au delà du site de la plaie initiale et, la pseudo tumeur deviendra plus dure, plus lisse, de forme irrégulière et hyper pigmentée. Ces cicatrices sont responsables de douleurs (sensation de brulure), prurit (lié à la dégranulation des mastocytes), de paresthésies de contact, de sensation de tiraillements, des ulcérations et des infections peuvent également s’observer ; favorisées par des lésions de grattage, des inclusions de poils ou encore, un défaut d’hygiène. Les chéloïdes peuvent donc constituer de sévères troubles d’ordre esthétique, fonctionnel voire psychologique et la récidive reste fréquente malgré les divers traitements qui peuvent être proposés. Ces signes cliniques sont parfois plus invalidants que le simple aspect disgracieux de la cicatrice et représentent souvent le motif principal de la plainte. Leur durée d’évolution est variable mais elles peuvent mettre plusieurs années avant d’atteindre leur taille maximale. Ce qui les diférencie des autres pathologies de la cicatrisation est leur absence d’amélioration avec le temps.

La localisation
Aucune région du corps ne peut être épargnée, mais certaines zones anatomiques montrent une prédisposition à l’apparition des chéloïdes. En efet, elles seront préférentielles aux zones de fortes tensions cutanées au niveau des zones supérieures du corps telles que le thorax, l’épaule, le menton et le dos. D’autres présentes au niveau des lobes auriculaires, sont consécutives à un perçage d’oreilles. La région sous-ombilicale (pubienne) sera atteinte principalement chez la population féminine en raison d’épilations traumatiques ou lors de césariennes. À l’inverse, certaines zones ne sont pratiquement jamais atteintes : les paupières, les paumes des mains, les plantes des pieds. Il n’existe pas non plus d’atteinte des muqueuses.

Les Facteurs favorisants
Rien ne peut laisser prévoir l’apparition d’une chéloïde. Certains facteurs seraient prédisposant.
• prototype cutané roux > blond > brun
• race : il est classique de dire que les peaux noires sont prédisposées
• facteurs héréditaires, hormonaux
• facteurs locaux : infection, corps étranger (un fl chirurgical peut sufre …)
• siège de la cicatrice : pré-sternale deltoïdienne

Prévention et thérapeutique.
Imprévisible, la chéloïde a une tendance désespérante à la récidive. Sa dégénérescence sous forme de carcinome épidermoïde plusieurs années après est rare mais suffit à justifier sa prévention, notamment chaque fois qu’un facteur favorisant est retrouvé :

Compression et massages: entrepris avant la 3ème semaine, ils ont un rôle préventif comme dans l’hypertrophie. Ils peuvent également freiner la prolifération.
La cryothérapie : se définit comme la destruction par le froid d’un volume cible donné. Elle est utilisée depuis de nombreuses années dans le traitement des tumeurs bénignes cutanées et par extension à celui des chéloïdes et des cicatrices hypertrophiques
• Les ultrasons qui agissent sur le prurit et la douleur. N’ont pas de rôle préventif.
• Les corticoïdes qui ont une action certaine et sont actuellement la base du traitement médical mais doivent être utilisés avec précaution en pédiatrie. La voie systémique n’est certainement pas indiquée chez l’enfant. Les injections locales intra-lésionnelles de triamcinolone (Kénakort retard) toutes les 2 à 3 semaines jusqu’à 10 ou 12 séances semble être le meilleur traitement médical. Douloureuses, ces séances peuvent être réalisées après application de pommade anesthésique de contact. Les doses diffusant par voie générale sont difficiles à quantifier.
La bléomycine : est un antinéoplasique cytostatique ayant une efficacité anti-tumorale, antibactérienne et antivirale. Elle agit par inhibition de la division cellulaire, entrainant une apoptose des fibroblastes. Elle inhibe également TGFβ diminuant ainsi la synthèse de collagène. La bléomycine est utilisée en injections intra lésionnelles de 0,1 à 1mL par séance, à une concentration de 1mg/ml. Les injections sont renouvelées toutes les 4 semaines avec un maximum de 5 séances. Ce produit est très efcace sur les symptômes liés à l’inflammation de la cicatrice (rougeurs, prurit, douleurs). L’hyperpigmentation et les douleurs lors de l’injection sont les principaux effets secondaires, d’où l’association d‘un anesthésiant. Son faible coût est aussi un avantage.
• La chirurgie.
Le risque de récidive après la chirurgie est important et le patient doit en être prévenu. Elle consiste en une excision simple en s’abstenant de toute plastie pour ne pas allonger la cicatrice. La résection doit être intra-lésionnelle et les berges traumatisées le moins possible. Des injections locales de corticoïdes peuvent être un appoint au traitement chirurgical.
• La radiothérapie employée seule pour le traitement des chéloïdes est peu efcace. En revanche, de multiples travaux font état de résultats satisfaisants en combinant la radiothérapie avec la chirurgie, idéalement dans les 24h post-opératoires . Le but de l’irradiation est de délivrer une dose efcace et sans danger sur un volume ciblé afn d’éviter l’exposition des tissus sains avoisinants. Les efets secondaires sont : infammation, ulcérations, télangiectasies, hypopigmentation, rougeurs, atrophie cutanée, nécroses, risque de cancers.
Deux formes d’irradiations sont possibles :
∗ La radiothérapie superficielle (ou externe)
∗ La radiothérapie interstitielle (ou curiethérapie)

La curiethérapie est une technique consistant en la mise en place suite à l’exérèse dans le derme superficiel, d’un tube vecteur plastique dans lequel va se glisser un fil radioactif d’iridium 192. Ce tube doit être situé à 5mm de profondeur environ et doit épouser la forme de la cicatrice. Pour le traitement des chéloïdes, une dose de 20 Gy va permettre d’irradier un volume cylindrique de 1cm de diamètre. La dose choisie correspond approximativement au tiers de la dose nécessaire au traitement d’un cancer cutané. La durée d’irradiation est de 24 à 48h selon l’activité du fil radioactif, et nécessite une hospitalisation en chambre plombée. A la fin de la procédure, le fil et le tube sont retirés. Les effets secondaires immédiats sont modérés en raison de la faible dose délivrée.

• Les lasers
Deux types de lasers sont décrits pour le traitement des cicatrices chéloïdes.

∗ Les premiers sont les lasers ayant une action de destruction tissulaire, dont l’objectif est de détruire la chéloïde, sorte d’excision du tissu chéloïdien. Il s’agit des lasers « ablatifs » tels que le C02 10600 nm et le Er:YAG pulsé 2940 nm. La plaie qui en résulte devra être couverte par des pansements pendant plusieurs semaines, le temps de laisser place au processus de cicatrisation. Au même titre que la simple excision chirurgicale, la récidive est très fréquente.
∗ Le deuxième type de laser utilisé est le laser à colorant pulsé (PDL) 585 et 595 nm, qui est un laser « vasculaire ». Plusieurs études décrivent une efficacité supérieure à 75%. Le mécanisme d’action repose sur une photothermolyse des vaisseaux permettant une amélioration de l’érythème et du prurit. Néanmoins, à ces longueurs d’ondes, l’action escomptée ne s’applique qu’à la partie superfcielle de la chéloïde (environ 1mm d’épaisseur) et par conséquent, ce type de traitement ne conviendra pas aux cicatrices épaisses. L’autre limite est l’absorption par la mélanine, chromophore cutanée qui rentre en compétition avec l’hémoglobine. L’action du laser est donc atténuée, voire contre-indiquée chez les sujets de phototype élevé qui sont les plus à risque de cicatrices chéloïdes. Les lasers ont certes une efficacité dans le traitement des cicatrices hypertrophiques (moins volumineuses), des cicatrices hyperpigmentées et érythémateuses, mais faiblement sur les chéloïdes.

Les nouvelles pistes de recherche:

  1. La toxine botulinique A : La toxine botulique est parfois utilisée pour l’amélioration esthétique des chéloïdes par une injection post-opératoire immédiate dans les muscles adjacents à la cicatrice. Cela va entrainer une paralysie fasque des muscles striés par inhibition de relargage d’acétylcholine à la jonction neuromusculaire pendant une durée de 3 à 4 mois, réduisant ainsi les forces de tension pendant les phases de cicatrisation. Des injections intra lésionnelles de 20 à 140 UI de toxine espacées d’un mois dans les cicatrices ont été étudiées par plusieurs équipes avec des résultats intéressants : la couleur, la consistance, la taille et les symptômes auraient été améliorés dès la première injection. Pour d’autres équipes, les injections de toxine diminueraient l’érythème, le prurit, les douleurs, amélioreraient la souplesse cutanée, mais n’auraient aucun effet thérapeutique. Enfin, très peu d’effets indésirables ont été rapportés lors de l’utilisation de la toxine et aucun n’était grave. Par conséquent, cette technique constitue une option à approfondir pour Le traitement et la prévention des cicatrices chéloïdes.
  2. L’interleukine 10 : L’interleukine 10 (IL 10) est une cytokine qui diminue la réponse infammatoire par inhibition d’IL-6 et IL-8 proinfammatoires. Cette voie représente donc une nouvelle piste pour les pathologies de la cicatrisation en règle générale.